On sait depuis peu que nos cellules sont capables de régénérer leurs parties abîmées ou usées par le temps. Notre corps entier peut bénéficier de ce « rajeunissement cellulaire ». Ce processus s’active par le jeûne, même court, mais aussi avec d’autres méthodes simples.
L’autophagie : la régénération dans nos cellulesLittéralement, ce mot signifie que nos cellules se « mangent elles-mêmes ». En fait, elles disloquent en elles des particules usées ou étrangères (grâce à des enzymes) pour les utiliser éventuellement plus tard. Dans certains cas, elles peuvent « faire du neuf avec du vieux » et recycler des protéines dégradées en nouveaux composants cellulaires. Elles peuvent aussi en tirer de l’énergie, comme nous le verrons.
Cette fonction existe en chacune de nos cellules. En fait, ce processus de nettoyage et de réparation se fait naturellement, de manière cyclique, pendant les phases où la cellule est en repos relatif, mais elle a tendance à devenir moins active avec l’avancée en âge.
L’autophagie (ou autolyse) permet aux cellules d’éliminer des particules ou substances indésirables qui ont pu pénétrer dans les cellules : virus, bactéries, toxines, protéines dégénérées…(1) Ainsi, elle est impliquée dans des maladies infectieuses mais aussi des troubles neurodégénératifs, le cancer (2), etc… Elle améliore notre système immunitaire, réduit l’inflammation et protège notre système cardiovasculaire, parmi bien d’autres effets bénéfiques.
Chaque jour, sur les millions de réactions qui se produisent dans nos cellules, certaines ont des « ratés » et produisent des composants anormaux ou trop usagés. Lors de l’autophagie de ces composants détériorés, une sorte de « recyclage des pièces défectueuses » de la cellule se fait. Ces composants peuvent être classés parmi nos fameuses toxines qui, avec le temps, « encrassent » notre corps.
L’autophagie est aussi décrite comme une source alternative d’énergie pour la cellule, mise en oeuvre lors de certains stress comme le jeûne, la baisse du sucre dans le sang, les efforts intenses, ou le manque d’oxygène… En clair, pendant ces périodes de stress, la cellule génère de l’énergie en « brûlant » ses déchets.
Parmi les composants importants de la cellule, vous avez peut-être entendu parler des mitochondries, ces « petites chaudières » qui brûlent oxygène et nutriments pour produire l’énergie de votre corps.
Etant le siège de fortes réactions oxydantes, leur mauvais fonctionnement ou leur détérioration est très préjudiciable à notre santé. En effet, des radicaux libres* peuvent alors être produits en excès et abimer à leur tour d’autres éléments de la cellule, voire son ADN (qui contient nos gênes) puis sortir de la cellule pour attaquer d’autres tissus.
Ces réactions d’oxydation se poursuivent jusqu’à ce que notre système antioxydant les neutralise. Des études ont montré des corrélations entre ce phénomène et l’accélération du vieillissement, le cancer et des maladies dégénératives.
Ainsi, l’autophagie peut apparaitre comme LE système anti-âge de notre corps. Ceci dit, n’oublions pas qu’il s’agit d’un phénomène normal comme d’autres mécanismes de défense et de réparation de notre corps et pas d’un remède miracle. La vraie découverte, c’est que l’autophagie a tendance à se réduire avec l’âge et surtout avec notre mauvaise hygiène de vie, laissant ainsi s’installer les maladies dégénératives. La bonne nouvelle, c’est que l’on peut agir pour la réveiller et utiliser ce fabuleux outil.
Jeûne et autophagie : un duo pour la santéL’autophagie a suscité beaucoup d’intérêt chez les chercheurs depuis sa découverte dans les années 60. Le jeûne, lui, est employé dans les médecines traditionnelles depuis la nuit des temps. Maintenant, on comprend mieux pourquoi la tradition enseigne que lorsque le corps est libéré du travail de la digestion, il utilise son énergie à éliminer ses déchets et à se réparer.
Jeûne et détoxicationEn plus de stopper toute possibilité d’ingérer des toxines, le jeûne aurait une action détoxicante, principalement en activant l’autophagie. Cette détoxication est plus puissante qu’avec un simple régime hypotoxique. Elle s’exerce à l’intérieur même de nos cellules.
C’est très intéressant car la majorité des techniques de détoxication visent plutôt l’élimination des toxines contenues dans le sang ou dans le milieu où baignent nos cellules (et qui les nourrit). Ces techniques évacuent les toxines par les organes d’élimination (foie, rein, colon…). L’autophagie, elle, nettoie et restaure en même temps, l’intérieur des cellules.
Autophagie et maladies dégénérativesDes études sur les maladies neurodégénératives ont montré que les neurones pouvaient éliminer leurs toxines et régénérer leurs mitochondries abimées grâce à l’autophagie (3). Celle-ci peut être déclenchée, au niveau du cerveau, lors d’un jeûne et serait nettement plus efficace pour cela que les autres diètes restrictives (9). Ce processus d’autolyse peut s’attaquer aux dépôts intracellulaires qui s’observent avec le vieillissement, en particulier dans des maladies comme Alzheimer.
Il a aussi été montré que l’activation de l’autophagie pouvait améliorer l’état de reins abimés par le diabète (4) et pouvait aussi jouer un rôle dans l’arthrose chez les souris.
Jeûner contre le vieillissement grâce à l’autophagie Le jeûne pour rajeunir ?Le jeûne favorise les phénomènes d’autophagie qui permettent la régénération cellulaire et évitent d’accélérer le vieillissement et certains phénomènes d’oxydation. Le jeûne peut ainsi être considéré comme une technique anti-âge.
Rajeunir est une préoccupation de l’homme depuis très longtemps. Dans son 3° livre, le Dr Hiromi Shinya parle d' »enzyme de rajeunissement » et cite les recherches sur l’autophagie du Pr Mizushima de Tokyo. Il préconise, de son côté, des mini-jeûnes de 16 à 24 h, répétés régulièrement. Il se base aussi sur les études du Pr Panda (La Jolla Californie) qui ont montré ce qui suit :
Des souris mangeant une nourriture très riche en graisses et en calories, à n’importe quel moment de la journée, pendant 100 jours, voient leurs paramètres de santé se détériorer (obésité, excès de graisses et de sucres dans le sang, problèmes hépatiques…). En revanche, des souris qui mangent exactement la même chose, en même quantité mais pendant seulement 8 heures de la journée et jeûnant pendant les 16 autres heures, n’ont pas ces troubles et voient même leur forme s’améliorer. A priori, le métabolisme du corps est positivement modifié par des périodes de jeûne bref (en tout cas pour les souris).
Ceci paraît intéressant, d’autant plus que le Pr Malene Hansen a montré que des périodes de jeûne, induisant l’autophagie chez le ver, pouvaient rallonger sa durée de vie de 25% ! Notons quand même qu’il s’agit (comme bien souvent) d’études sur des animaux.
D’autres recherches vont dans ce sens (5)(6). Le biologiste Pr Ohsumi a consacré sa vie à étudier les mécanismes de ce phénomène (prix Nobel 2016) et ses implications dans la lutte contre les maladies dégénératives, le cancer, les infections…(8)
Enfin, il semblerait que la plupart des techniques qui ont réussi à rallonger l’espérance de vie dans les modèles expérimentaux de manipulations génétiques ou d’administration de substances (comme resvératrol, lithium, rapamycine…), stimulent finalement l’autophagie.
Ce processus cellulaire semble donc très intéressant pour rajeunir un corps dans sa globalité et pour conserver la santé. De plus, ses effets seraient particulièrement probants au niveau de la peau.
Jeûne et traditions
On peut noter que, souvent, les populations riches en centenaires connaissent des périodes de disette où elles ne pas mangent pas forcément tous les jours ou à tous les repas. Cela contribuerait-il à leur santé d’acier et à leur longévité ? C’est possible.
La plupart des religions demande des périodes de restriction alimentaire ou de jeûne. Il s’agit le plus souvent d’une journée de jeûne hebdomadaire, ou bien de jeûne alternatif comme dans le ramadan où il est permis de manger la nuit. Si l’on ôte les heures de sommeil, on est proche de jeûnes de 16 à 18 heures.
La médecine traditionnelle ayurvédique ne préconise pas de jeûnes longs dans l’hygiène de vie. Ils servent plutôt à soigner des maladies, où ils sont d’ailleurs très efficaces. En revanche, elle conseille volontiers une journée hebdomadaire de jeûne, en routine, pour libérer Ama (les toxines) et régénérer Agni (notre capacité digestive) en mettant l’estomac au repos. Cette journée s’adapte à la constitution du patient (jeûne total ou alimentation liquide ou très légère…). Dans certains cas, il pourra s’agir d’ôter simplement un repas par jour pour alléger la charge digestive et toxinique.
Notons enfin que la naturopathie enseigne depuis longtemps que, lors d’un jeûne, l’organisme puise intelligemment dans ses réserves. Elle dit qu’il puise tout d’abord dans la graisse, puis dans les tissus détériorés, puis dans les tissus les moins importants, etc… Une fois de plus la science nous dit que ces concepts n’étaient pas qu’imaginaires.
Comment stimuler l’autophagie dans nos cellules ? Les jeûnes
L’absence de nourriture entraîne une baisse de l’insuline et une élévation de l’hormone glucagon qui active l’autophagie. Le glucagon évolue en principe à l’inverse de l’insuline. L’autophagie est ainsi activée de façon intense avec 24 à 48 heures de jeûne mais elle pourrait déjà augmenter dès 16h sans nourriture (9). Cette activation serait d’autant plus rapide que le sujet aurait une alimentation à faible teneur glucidique pendant les autres jours.
Le jeûne n’étant pas facile à suivre longtemps, il y a de plus en plus d’adeptes de jeunes courts répétés ou jeûnes intermittents qui fonctionnent bien aussi, d’après les études. D’ailleurs, il n’est pas dit qu’activer son autophagie en permanence soit très bon et certains articles scientifiques en ont évoqué des dangers.
Activant l’autophagie de façon cyclique, les jeunes intermittents sont, le plus souvent :
– des jeûnes de 16 heures (16/8) en sautant soit le petit déjeuner, soit le repas du soir et en mangeant assez léger au repas précédant le jeûne, afin que la digestion soit la plus courte possible (ceci pourrait se faire aisément 1 à 3 fois par semaine, ou plus),
– faire un seul repas dans la journée (c’est la diète dite « du guerrier », 20h de jeûne et 4h pour s’alimenter),
– des jeûnes d’une journée (6:1 ou 5:2) : 1 ou 2 fois par semaine, etc…
La durée et la répétition de ces jeûnes devraient s’adapter à chaque situation et à chaque personne selon sa constitution, comme toujours. Certaines personnes très fragiles ne devraient les mettre en pratique que sous avis médical.
Les autres stress cellulaires activateurs de l’autophagie
Jeûner est certainement l’activateur le plus puissant en privant la cellule de nutriments, mais d’autres situations de stress cellulaire peuvent aussi avoir cet effet stimulant. S’ils restent raisonnables, ils induisent un stress modéré pour le corps qui, en s’y adaptant, verra de nombreuses fonctions s’améliorer dont l’autophagie.
Voici une liste de ces activateurs :
- L‘état de cétose par privation de glucides : lorsque nos cellules n’ont plus de glucose à brûler, elles utilisent les graisses et fabriquent alors des corps cétoniques.
- L’activité physique et le sport : les exercices de haute intensité seraient les plus performants, et demandent seulement 30 mn pour commencer à être efficaces.
- L’exposition à la chaleur forte (comme le sauna).
- L’exposition au froid intense, la privation momentanée d’oxygène pour la cellule, favorisent également l’autophagie.
Nous avons ici le fameux phénomène d’hormèse : un organisme vivant qui reçoit un stress suffisamment fort pour le faire réagir mais pas trop, pour qu’il s’en remette, va réagir en se renforçant et en augmentant ses fonctions de défense. L’autophagie est une de celles-ci.
Les aliments et produits naturels
L’exposition modérée aux UV et sa production de vitamine D3, sont aussi activatrices.
Certains produits naturels ont le même effet de stimulation sur l’autophagie : le resvératrol (et les autres polyphénols en général), les catéchines du thé vert, le berbéris (par sa berbérine), la spermidine, le curcuma, la vitamine K, la tréhalose des champignons comme le shitaké, les sulforaphanes (crucifères : choux, brocolis…), la quercétine (oignon, raisin, pomme…), l’apigénine (orange, pomme, raisin…), la capsicaïne du piment, le café…
Les conseils pratiques d’Anti-âge Intégral :
Si vous prenez des compléments alimentaires pour activer l’autophagie, faites le en modifiant d’abord votre hygiène de vie. Ayez une action globale. Voici comment prendre les plus utilisés :
– Resvératrol : c’est un grand classique des remèdes anti-âge, grand antioxydant. Il favorise aussi la production d’énergie dans nos cellules, renforce le système vasculaire et prévient beaucoup de maladies liées au vieillissement selon de nombreuses études (diabète, cancer, athérosclérose…). Les doses efficaces dans les études réalisées sont d’environ 500 mg par jour.
– Thé vert (titré en polyphénols et flavonoïdes pour des taux de substances actives contrôlés) : c’est aussi un antioxydant puissant. Prendre en traitement de fond 800 à 1200 mg par jour. Beaucoup d’études aussi sur la prévention des cancers (digestifs, sein, poumon…), des effets contre la formation du mauvais cholestérol et protecteurs cardiovasculaires, également stimulant des défenses immunitaires…
D’autres produits moins naturels comme la rapamycine, la metformine ou le lithium, par exemple, peuvent également activer les processus de l’autophagie mais ils ne sont pas forcément dénués d’effets secondaires. Ils sont connus pour être utilisés en médecine anti-âge et ont fait l’objet d’études ayant rallongé la durée de vie chez l’animal. En particulier, la metformine est un antidiabétique qui fait l’objet (en 2016) d’expérimentation chez l’homme dans le but d’améliorer la longévité. Ces produits sont délivrés uniquement sur prescription médicale et l’avis d’un médecin compétent est hautement souhaitable.
En conclusionL’autophagie est une grande découverte. Elle connait un certain phénomène de mode (parallèle à celle du jeune intermittent) ces dernières années. Ce n’est toutefois pas une nouvelle technique de réjuvénation ni une pilule magique, mais une fonction normale de nos cellules, que nous utilisons tous. Il y a donc 2 cas de figures :
- notre autophagie est ralentie ou affaiblie (par l’âge, par une alimentation trop riche, trop sucrée, trop fréquente, un manque de sommeil, un surmenage, etc…). Dans ce cas, nous avons tout à gagner à la stimuler et des résultats devraient être évidents. Comme par hasard, cela se fera surtout en améliorant notre hygiène de vie (manger moins souvent (voire manger moins), bouger, prendre des temps de repos…). Et si c’était cela le plus important ?
- notre autophagie a déjà un bon niveau de fonctionnement. Dans ce cas, on peut penser que sa stimulation nous renforcera (comme avec l’hormèse) et ça sera possiblement le cas. Jusqu’à quel point ? C’est difficile à dire mais n’oublions pas que la science tend aussi à montrer que trop d’autophagie peut être néfaste pour la santé.
Une fois de plus, c’est la voie du milieu que nous recommandons. Evitez les extrêmes, la santé est un équilibre.
Il est logique de chercher à activer son autophagie pour lutter contre les effets indésirables de l’âge, et en particulier les risques de maladies dégénératives. Rien ne prouve à ce jour que vous vivrez 120 ans grâce à cela mais vous augmenterez certainement votre vitalité. C’est déjà très bien.
Les remèdes naturels proposés pour cela ont également d’autres effets anti-âge. Certains sont anti-oxydants ou anti-glycation, d’autres protègent nos mitochondries, sont sénolytiques*, etc… Les utiliser par cures de 2 ou 3 mois dans le cadre d’une amélioration globale de l’hygiène de vie pourra être judicieux et permettra de se faire une idée des résultats. Certains auteurs proposent des programmes sur plusieurs semaines allant dans ce sens. Nous pensons qu’il n’y a pas une méthode unique pour tout le monde mais qu’il faut la configurer selon la constitution de chaque personne pour en tirer tous les bienfaits.
Quant aux jeunes courts et/ou intermittents, ils ne présentent pas de risques pour la santé malgré bien des sottises que l’on a pu entendre comme « il ne faut surtout pas sauter un repas« , « le jeûne fait perdre du muscle qu’on ne reprend jamais« , « quand on jeûne, il ne faut rien faire« , etc… Alors, en l’adaptant toujours à son cas personnel, pourquoi ne pas essayer pour se faire une idée ?