Le capitalisme a érigé un système basé sur l’illusion du manque, nourri par Avidya (l’ignorance) et par une déconnexion fondamentale de notre véritable nature, Purusha. Ce système, conçu pour exploiter nos désirs artificiels (Raga), aurait pu, et aurait dû, être différent. Nous aurions pu bâtir une société qui respecte Rta, l’ordre cosmique universel, en alignant nos choix sur les besoins réels et en cherchant une harmonie avec la nature et les cycles de la vie. Au lieu de cela, nous avons accepté, souvent passivement, une dynamique qui détruit notre humanité, fragilise notre environnement et aggrave les inégalités.
Sur le plan politique, il est évident que nos dirigeants, s’ils avaient été guidés par le Dharma – une éthique universelle et juste –, auraient pu construire des systèmes équitables et durables. La concentration des richesses entre les mains d’une minorité n’est pas une fatalité. Les multinationales auraient pu être réglementées dès le départ pour prévenir les abus, et les ressources mondiales auraient pu être gérées collectivement, en veillant à leur redistribution équitable. Si le principe de Vasudhaiva Kutumbakam – “le monde est une seule famille” – avait été le socle des relations internationales, nous n’aurions pas accepté que des nations soient pillées et des peuples réduits à la misère pour satisfaire les caprices des puissants.
Socialement, nous avons manqué une opportunité historique. Une éducation fondée sur les principes de Satya (vérité) et Ahimsa (non-violence) aurait pu armer les générations futures contre les manipulations médiatiques et consuméristes. Nous aurions pu valoriser les savoirs ancestraux, ceux qui respectent les rythmes naturels comme la Ritucharya en Ayurveda, pour construire des sociétés plus résilientes et respectueuses des écosystèmes. Au lieu de cela, nous avons laissé l’individualisme dominer, détruisant les liens communautaires et légitimant des systèmes d’exploitation où les plus faibles sont abandonnés.
Sur le plan écologique, la trahison est flagrante. Si nous avions respecté Prithvi (la Terre) comme un être vivant et sacré, plutôt qu’un gisement à exploiter, nous aurions pu éviter les désastres environnementaux qui s’amoncellent aujourd’hui. L’agriculture régénérative aurait pu devenir la norme, les énergies fossiles auraient pu être abandonnées dès que les dégâts étaient évidents, et des politiques basées sur Sattva (pureté et clarté) auraient pu guider nos choix collectifs. Au lieu de cela, nous avons tourné le dos à la Terre et à ses cycles, tout en prêchant une croissance infinie sur une planète finie.
Mais ce n’est pas seulement le système qui a échoué : c’est aussi une démission spirituelle. Si nous avions cultivé Dhyana (méditation), Pranayama (maîtrise du souffle) et Tapas (discipline personnelle), nous aurions pu développer une conscience plus aiguisée de notre rôle dans l’ordre universel. En nous reconnectant à notre Prakriti (notre constitution naturelle) et à notre Dharma personnel, nous aurions pu choisir des vies en harmonie avec nous-mêmes et le collectif. Au lieu de cela, nous avons couru après des mirages matérialistes, abandonnant le Swastha – cet état d’équilibre intégral entre l’esprit, le corps et l’âme – au profit d’une insatisfaction permanente.
Ce système n’était pas inévitable. Nous aurions pu construire un monde basé sur l’équité, la solidarité et le respect de la Terre, un monde où les principes védiques comme Yajna – le sacrifice pour le bien commun – auraient guidé nos décisions collectives. Au lieu de cela, nous avons laissé la logique du profit court-termiste dicter nos vies. Mais il n’est pas trop tard pour s’éveiller. Le capitalisme n’est pas une fatalité ; c’est un choix que nous pouvons rejeter. Nous avons les outils, la sagesse ancestrale et les connaissances nécessaires pour reconstruire une société qui honore la dignité humaine, protège la planète et restaure l’harmonie entre l’individu, la société et le cosmos. Cela demande une conscience militante, une volonté inébranlable et une solidarité mondiale. Est-il (encore) temps de briser les chaînes, de réaffirmer nos valeurs et de reprendre la maîtrise de notre destinée collective?
Armanda Dos Santos