Rentrer en Kuti, c’est faire le choix audacieux de délaisser le monde tel qu’il est, de le laisser derrière soi, non pas avec angoisse ou renoncement, mais avec une sérénité profonde. C’est accepter que le monde continue de tourner, que la vie poursuive son cours, tandis que l’on s’offre le cadeau rare de mettre tout en pause, de prendre du recul pour se reconnecter à l’essentiel.
Oser entrer en Kuti, c’est s’autoriser à se détacher des préoccupations, des responsabilités, des bruits incessants qui envahissent notre quotidien, sans pour autant les fuir ou les nier. C’est comprendre que pour retrouver la clarté, il est parfois nécessaire de prendre de la distance, de suspendre le flot incessant des actions et des pensées. Ce n’est pas un acte de rejet, mais un acte de confiance : la confiance que le monde, tel qu’il est, peut continuer sans notre présence constante, que nos obligations peuvent attendre, que tout peut être remis à plus tard, pour un temps.
Dans cette retraite, il n’y a pas de craintes à emporter, pas de bagages émotionnels à traîner. On entre en Kuti avec la légèreté de celui qui sait que le véritable trésor ne se trouve pas dans ce que l’on possède ou ce que l’on contrôle, mais dans ce que l’on découvre au plus profond de soi. On laisse tout ce qui est extérieur à la porte, non par indifférence, mais parce que l’on reconnaît la nécessité de se tourner vers l’intérieur, de se ressourcer, de se recentrer.
C’est un acte de courage tranquille, d’oser faire cette pause, de mettre en suspens le mouvement perpétuel de la vie, non pas pour fuir, mais pour mieux revenir. Rentrer en Kuti, c’est embrasser la solitude, le silence, la simplicité, avec la certitude que le monde sera là, inchangé, à notre retour. Mais c’est aussi se permettre de changer, de se transformer, d’évoluer dans cet espace de recul.
Il n’y a rien à craindre, car ce retrait n’est pas une perte, mais un gain inestimable de perspective, de paix, de clarté. C’est accepter de ne rien emporter d’autre que soi-même, dans sa vérité la plus nue, et de faire confiance à ce que l’on trouvera dans ce silence. C’est oser délaisser le contrôle, les attentes, les peurs, pour se plonger dans l’immobilité et en ressortir renouvelé.
Et pourtant, en entrant en Kuti, on ne délaisse rien de ce qui compte vraiment. On ne laisse pas derrière soi l’amour, la compassion, la responsabilité envers les autres. Au contraire, on les porte avec soi, plus légers, plus purs, prêts à être revitalisés par cette pause. C’est un moment pour se rappeler que parfois, le plus grand acte de service que l’on puisse offrir au monde est de se retirer pour revenir plus fort, plus aligné, plus en paix.
Rentrer en Kuti, c’est accepter que l’on peut tout laisser en suspens, tout mettre en pause, parce que l’on sait que ce que l’on va trouver dans cette retraite, ce que l’on va redécouvrir de soi-même, apportera une valeur infinie au monde lorsque l’on y retournera. C’est un acte de foi, un saut dans l’inconnu intérieur, avec la confiance que tout ce qui est important sera là, intact, à notre retour, mais que nous-mêmes, nous reviendrons transformés, renouvelés, prêts à embrasser la vie avec une nouvelle profondeur et une nouvelle clarté.
Rentrer dans le noir
Rentrer dans le noir, c’est comme mourir un peu, comme s’abandonner à une dissolution douce et nécessaire. C’est une plongée dans l’inconnu, un lâcher-prise total, où l’on accepte de laisser derrière soi la lumière familière du monde extérieur, pour se fondre dans l’obscurité qui enveloppe tout. C’est une mort symbolique, un renoncement à ce que l’on connaît, à ce que l’on contrôle, pour se livrer au mystère, à l’invisible, à ce qui existe au-delà de nos sens.
Dans cette obscurité totale, on meurt à l’ancien, à ce qui a été, à ce que l’on croyait être. C’est un retour à cet état originel, un retour au ventre de la création, où l’on se dissout dans le néant pour mieux renaître. Le noir devient un cocon, un lieu de gestation où l’âme se prépare à émerger sous une nouvelle forme, plus pure, plus authentique.
Cette expérience est à la fois terrifiante et libératrice. Terrifiante, car elle nous dépouille de tout ce qui nous est familier, nous force à affronter nos peurs les plus profondes, à entrer en contact avec nos ombres. Libératrice, car c’est seulement en mourant à ce que nous étions, que nous pouvons renaître à ce que nous sommes appelés à devenir.
Rentrer dans le noir, c’est accepter de se perdre pour mieux se retrouver. C’est un acte de foi, de confiance en ce processus mystérieux de transformation. On sait que pour que quelque chose de nouveau naisse, il faut que l’ancien meure. Dans ce noir, il y a une promesse de renouveau, de renaissance, mais avant cela, il y a cette mort symbolique à travers laquelle il faut passer.
Le silence et l’obscurité deviennent des compagnons dans cette traversée, des guides qui nous mènent à travers ce passage entre deux états d’être. Chaque souffle dans ce noir est une petite mort, un détachement progressif des anciennes peurs, des anciens schémas, des anciennes identités. On s’enfonce plus profondément dans ce noir, comme dans un sommeil sans rêve, où l’esprit se dépouille de tout ce qui est superflu, de tout ce qui est attaché au monde visible.
C’est un processus de purification, où l’on meurt à la surface pour toucher l’essence. Et dans ce noir, on apprend à écouter une nouvelle forme de vie, une nouvelle lumière qui ne brille pas à l’extérieur, mais qui émane de l’intérieur. C’est une lumière subtile, qui commence à naître dans les profondeurs du noir, une lueur qui grandit à mesure que l’on se libère des couches d’ancien.
Cette mort symbolique dans le noir est en réalité une préparation à la renaissance. C’est un retour à la source, à ce point zéro où tout commence, où tout est possible. C’est là, dans cet espace de noir profond, que l’on trouve la promesse de la vie renouvelée, de l’être renouvelé.
Rentrer dans le noir, c’est accepter de mourir un peu, pour renaître beaucoup. C’est un acte de transformation profonde, où l’on laisse derrière soi ce qui était pour embrasser ce qui sera. C’est un voyage vers la profondeur, où l’on meurt à soi-même pour renaître à son essence, plus lumineux, plus vivant, plus vrai.
Armanda Dos Santos