La colère est un incendie intérieur, un feu qui se propage sans prévenir et embrase tout sur son passage. Elle n’a pas de patience, pas de demi-mesure. Elle gronde dans les tripes, monte à la gorge, serre les poings, contracte les mâchoires. La colère est brutale, primitive, viscérale. Elle ne s’excuse pas, elle explose.
Elle est ce cri étouffé qui finit par jaillir, cette marée montante qu’aucune digue ne peut contenir. Elle fait trembler le corps, obscurcit l’esprit, déforme les mots. Elle est aveugle. Enragée. Et pourtant, elle est toujours une réponse, une réaction à quelque chose de profond. Une blessure, une injustice, une peur, un espoir trahi. La colère ne surgit jamais de nulle part ; elle est un messager, mais un messager violent, incapable de douceur.
La colère est une force brute, indomptée. Elle peut donner l’impression d’une puissance infinie, mais elle consume plus qu’elle ne construit. Elle pousse à frapper, à crier, à détruire. Elle est un besoin urgent de libération, de défoulement, d’expulser cette énergie qui brûle de l’intérieur. Elle est un volcan qui ne sait qu’éclater, un orage qui ne sait que gronder.
Mais la colère n’est pas seulement destructrice. Elle est aussi une alerte, un signal. Elle pointe là où quelque chose en nous a été nié, bafoué, ignoré. Elle est l’écho de notre dignité blessée, la preuve que nous ressentons, que nous espérons, que nous croyons encore à quelque chose. Elle est une douleur qui refuse de se taire, une injustice qui réclame réparation.
La colère, cependant, est dangereuse. Elle peut nous faire perdre le contrôle, nous pousser à des mots, des gestes, des choix que nous regretterons. Elle est une énergie brute qui, si elle n’est pas canalisée, devient une arme retournée contre nous-mêmes ou contre les autres. Elle peut isoler, diviser, blesser plus profondément que la douleur qui l’a fait naître.
Mais dans son chaos, la colère porte aussi une potentialité. Si elle est écoutée, comprise, transformée, elle devient un moteur. Elle peut nous pousser à agir, à changer ce qui doit l’être, à nous battre pour ce en quoi nous croyons. Elle est une force qui, maîtrisée, peut devenir constructive, une braise qui éclaire plutôt qu’un feu qui détruit.
Un portrait cru de la colère ne serait pas complet sans reconnaître sa dualité : elle est à la fois poison et remède, destruction et éveil. Elle est un rappel de notre humanité, de nos limites, mais aussi de notre capacité à ressentir intensément, à nous révolter contre ce qui nous semble insupportable. La colère, dans toute sa brutalité, est une invitation à regarder ce qui brûle en nous, à écouter ce qu’elle tente de dire, et à choisir, consciemment, ce que nous voulons en faire.
Armanda Dos Santos